Environ 800 produits à "nanomatériaux" sont aujourd'hui sur le marché - des composants de bétons à séchage rapide tel que le noir de carbone, des ingrédients minéraux, comme le dioxyde de titane présent par exemple dans les crèmes solaires.
Les dangers des nanoparticules pour la santé au travail sont connus.
A la suite du rapport du National Institute for Occupational Safety and Health (NIOSH, l'autorité de santé au travail des Etats-Unis), ou de l'Institut québécois de santé au travail (IRSST), l'avis de l'Agence française de sécurité sanitaire de l'environnement et du travail (saisine n° 2006/06) note que "les analyses rigoureuses, par le groupe d'experts, de la littérature nationale et internationale ont permis d'identifier des dangers potentiels pour l'homme et l'environnement liés à l'exposition aux nanomatériaux manufacturés. L'exposition peut avoir lieu par voie cutanée, ingestion ou, plus fréquemment, inhalation. Les dangers identifiés reposent sur : la mise à jour des données sur la toxicité humaine des nanomatériaux (effets notamment pulmonaires, cutanés, oculaires, vasculaires, digestifs...), la génotoxicité, le danger d'explosion, et sur les données disponibles en matière d'écotoxicité des nanomatériaux".
Or, ce sont les institutions communautaires - Commission de l'Union européenne (UE), Parlement européen et conseil des ministres - qui, agissant de concert, sont dotées du pouvoir d'édicter des normes harmonisées dans le domaine de la santé au travail et dans celui de la santé publique.
Ainsi, sur la base de l'article 153 du Traité sur le fonctionnement de l'UE (TFUE), l'Union encourage les Etats membres, "par une harmonisation des conditions de travail, à améliorer l'environnement de travail pour protéger la santé et la sécurité des travailleurs". Pour ce faire, des "prescriptions minimales sont établies au niveau européen (...)".
PRÉOCCUPATION LIMITÉE
Dans le domaine de la santé publique, l'article 168 du TFUE organise une compétence d'appui à l'action des Etats "sur l'amélioration de la santé publique et la prévention des maladies et des affections humaines et des causes de danger pour la santé physique et mentale".
Depuis 1989, nombre de questions d'hygiène et de sécurité au travail sont régies par des règles communautaires intégrées dans la législation nationale.
Mais l'activité législative européenne a nettement ralenti depuis dix ans. Les risques sanitaires posés par la commercialisation des nanomatériaux sont une préoccupation récente, et limitée.
Ainsi, un règlement de 2009 définit, mais pour les seuls cosmétiques, les "nano-objets" comme étant des particules inférieures à 100 nanomètres de diamètre.
Dans le domaine de la santé au travail, la Commission a édicté, en 2008, un code de bonne conduite pour une recherche responsable en nanosciences et nanotechnologies, mais sous la forme d'une simple recommandation aux Etats membres.
Même le règlement, dit "Reach" - il oblige à un enregistrement des substances chimiques fabriquées ou importées dans des quantités d'une tonne ou plus par an sur une base de données centrale supervisée par l'agence européenne des produits chimiques - ne prend en compte que partiellement les nanoparticules.
Après le scandale de l'amiante et les insuffisances aujourd'hui avérées de la réglementation du bisphénol A, une nouvelle catastrophe sanitaire est prévisible pour les travailleurs manipulant des "nanomatériaux".
Fonte: Le Monde